Festival de théâtre des Amériques - Kaddish en forme d'hymne à la vie
Solange Lévesque - LE DEVOIR, MONTREAL (3 juin 2005)

L'énergie vitale dans ses expressions les plus diverses est au pouvoir dans cet hommage à Félix Lauwers, décédé en 2001, père de Jan Lauwers, le directeur de la compagnie bruxelloise Needcompany, auteur, metteur en scène, scénographe et interprète de ce spectacle. Ce père demeure d'ailleurs présent à travers l'accumulation de dizaines d'oeuvres d'art venant de l'Afrique et du Moyen-Orient, installées sur des présentoirs ou reproduites sur de grandes photos, qui constituent le décor du spectacle. à voir Jan Lauwers, la puissante Viviane De Muynck qui incarne Isabella et les huit autres interprètes polyvalents qui les accompagnent, on a l'impression que chacun porte en soi l'esprit du spectacle à chaque instant. L'atmosphère de cette farandole baroque rappelle la fête foraine dans laquelle chacun vient faire son numéro, mais en réalité, il s'agit d'une mise en scène aussi délicieusement compliquée qu'extraordinairement précise. Dès l'ouverture, Jan Lauwers s'adresse directement aux spectateurs pour préciser le contexte, l'importance qu'ont eue dans son enfance les oeuvres d'art que son père collectionneur rapportait de ses voyages et la place qu'elles occupaient dans sa vie d'enfant. Par la même occasion, il lui dédie La Chambre d'Isabella, qui raconte l'histoire d'une femme année par année à partir de 1910. Aujourd'hui âgée de 94 ans, Isabella vit dans une pièce où sont entassées les oeuvres rapportées par le père de Lauwers. Elle est aveugle mais «une petite caméra cachée au coin de ses lunettes noires lui permet de tout voir», explique l'auteur, qui s'empresse d'ajouter que, «bien sžr, cette caméra n'existe pas» et qu'«il faudra donc l'imaginer». Le ton est donné: l'invention et l'esprit ludique président à la narration de l'histoire d'Isabella, une femme affranchie, lucide et jeune d'esprit qui trône au milieu de la scène tandis qu'autour d'elle s'agitent dans une sorte de mouvement perpétuel les hémisphères gauche et droit de son cerveau, un prince du désert considéré comme son père putatif, un de ses ex et son jeune amant du moment qui se trouve à être son petit-fils, son père adoptif, sa mère ainsi que la «zone érogène» (sic) d'Isabella, tous personnifiés par des interprètes qui chantent et dansent aussi bien qu'ils jouent la comédie et la musique. Dans cette chambre blanche où temps et lieux se confondent, tous ces personnages cohabitent et dialoguent avec elle. Où que puisse se porter notre regard sur la scène, on découvrira toujours quelque chose d'inattendu en train de se passer. En réalité, c'est sur le XXe siècle que Jan Lauwers porte un regard archéologique avec une ironie lucide et sans amertume. Si chaque passage d'une année à l'autre n'était pas ponctué d'un coup de feu qui fait bondir, on pourrait presque croire que ce siècle n'a pas été le siècle de bruit, de fureur et de guerres sanglantes qu'il a été. La Chambre d'Isabella est encore à l'affiche ce soir. Il faut courir toutes affaires cessantes voir ce spectacle drôle, brillant, tonique et incomparable.

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