Un fou aux commandes
Helene Kurz - Wiener Zeitung (1 mai 2012)

“Je veux mêler le ciel et la mer”, hurle Caligula et il parade orgueilleusement devant une table de banquet surchargée. Après la mort de sa sœur Drusilla, également sa bien-aimée, l’empereur s’est mis en tête d’accéder à la liberté sans limite en déviant les normes existantes, par la torture, le viol et l’assassinat purement arbitraire. C’est la logique qui doit le guider. Il veut recréer le monde et offrir à ses contemporains le cadeau de la raison, pour ce faire, il fonce droit à sa propre perte. Les sénateurs, qu’il pousse toujours plus loin et persécute jusqu’au sang, ne sont pas franchement charmés par la radicalité de Caligula. Caligula en costume doré. Cornelius Obonya incarne un Caligula fou : le show est grandiose. Dans son costume doré, planté dans des baskets noires, il campe brillamment un empereur romain assoiffé de pouvoir et complètement fou ; il hurle, murmure, roule de grands yeux, balaie d’un geste la table dressée pour le festin et pris de fureur, étrangle ses sénateurs. Pendant ce temps, il veut qu’Helicon (Hermann Scheidleder), esclave affranche, lui décroche la lune. Mais Obonya maîtrise aussi des registres plus doux, lorsque le côté humain de Caligula, criblé de remords, se révèle brièvement. Aux côtés de l’empereur, Caesonia, alias Maria Happel. Aveuglée par son amour et son obéissance, elle exécute les ordres de Caligula et le soutient dans son entreprise absurde. Telle un serpent, elle zigzague, essaye de flatter et de survivre. Le rôle d’Octavia, lui, est ambigu : pendant toute la première moitié de la pièce, Anneke Bonnema change d’habits, elle se filme avec une petite caméra et fait les cent pas autour du festin, oisive. Après avoir été violée par un gigantesque cheval géant, la voilà qui peut mourir de façon mélodramatique. Jan Lauwers, depuis 2009 Artist-in-Residence au Burgtheater de Vienne, a distillé à partir du Caligula d’Albert Camus, avec l’artiste sonore Nicolas Field, une véritable fête pour les sens. Un arrière-plan acoustique de qualité accompagne l’action. Une installation sonore, des cymbales dorées, confère à la mise une tension, une dramatique, particulières, aux bons moments. A la fin, les sénateurs s’attablent au banquet et se gavent de schnitzels. Quand Caligula se joint à eux, ils quittent la salle un à un. Il ne reste qu’un pauvre homme, solitaire, tout seul, à la table vide de sa vie.

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